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4. Le plan dialectique
Voici un exemple de plan de développement dialectique que nous vous proposons d'observer attentivement. Dans le prochain moduel, vous apprendrez à vous servir du Grimoire, l'outil que Satan met gracieusement à votre disposition ; cet outil vous aidera à réaliser ce type de plan.
Mais pour l'instant, voyons ce dont il faut vous souvenir pour ne pas vous perdre dans les méandres de l'infernal plan dialectique.
- Les idées principales correspondent à des subdivisions du point de vue :
la première idée principale expose la thèse;
la deuxième idée principale expose l'antithèse;
la troisième idée principale correspond à un point de vue qui expose la synthèse et qui établit un lien avec le contexte social et/ou le courant littéraire.
- Les idées secondaires sont des arguments qui servent à expliquer ou à appuyer les idées principales et le point de vue.
- Les faits et les preuves servent à appuyer l'argument.
- La phrase de transition permet de faire un lien entre les idées principales.
Thèse
Idée principale 1 |
Effectivement, Léopold semble résigné à son sort d'ouvrier misérable. |
Idée secondaire 1.1 |
Il est tellement accablé par la vie qu'il mène qu'il se sent incapable de réagir. |
Fait |
Il évoque, avec ironie, le nombre d'années passées au service du même patron, qu'il déteste, montrant ainsi son impuissance à se sortir de sa douloureuse condition d'esclave. |
Preuve |
« C'est quasiment drôle quand tu penses que t'as commencé à travailler pour un gars que t'haïs à l'âge de dix-huit ans pis que t'es encore là, à le sarvir... » |
Idée secondaire 1.2 |
La relation déshumanisante qu'il entretient avec sa machine réprime sa volonté aussi bien que ses forces. |
Faits |
La démesure avec laquelle il insiste sur sa relation avec sa machine témoigne de son déchirement. Il la personnifie de manière à la rendre menaçante et dominatrice. Il se sent effondré et anéanti par son travail ingrat. Comme une bête de somme, il se sent enchaîné à sa machine depuis trop longtemps. |
Preuves |
« [...] tu fais partie de ta tabarnac de machine ! C'est elle qui te mène ! C'est pus toé qui watches quand a va faire défaut, c'est elle qui watche quand tu vas y tourner le dos pour pouvoir te chier dans le dos, sacrement ! »
« J'ai déjà l'air d'une loque. » « Quand j'me suis atelé à c'te ciboire de machine-là, j'étais quasiment encore un enfant. » |
Phrase conclusion/transition |
On comprend que Léopold est usé de s'être astreint à un travail répétitif, monotone et dégradant depuis tellement d'années et que, à cause de cela, il ne possède pas la force nécessaire pour changer sa condition. |
Antithèse
Idée principale 2 |
Pourtant Léopold laisse poindre un sentiment de révolte dans son monologue. |
Idée secondaire 2.1 |
La violence de ses paroles prouve qu'il accepte mal sa dure réalité de père pourvoyeur. |
Faits |
Il s'en prend à sa famille qu'il décrit comme des êtres avides, voraces et exigeants envers lui. Il utilise la métaphore animale pour exprimer sa profonde frustration. La culpabilité qu'il ressent face à ses enfants se manifeste par de l'ironie. |
Preuves |
« Quatre grandes yeules toutes grandes ouvertes, pis toutes prêtes à mordre quand t'arrives, le jeudi soir ! Pis quand t'arrives pas tu-suite […], ta chienne de famille, à mord pour vrai, okay ! »
« Ben oui, t'es t'un sans-cur ! Y faut pas te le cacher, t'es t'un sans-cur ! » |
Idée secondaire 2.2 |
Léopold s'en prend aussi violemment à la religion, plus particulièrement à Dieu. |
Faits |
Sa révolte s'exprime par des propos vulgaires. Léopold communique d'ailleurs toute sa rage et sa frustration par le langage cru du joual. |
Preuves |
« Ben le bon Dieu, j'le r'mercie pas pantoute, pis je l'ai dans le cul, le bon Dieu ! »
« Hostie ! Toute ta tabarnac de vie à faire la même tabarnac d'affaire en arrière de la même tabarnac de machine ! » |
Phrase conclusion/transition |
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Synthèse
Idée principale 3 |
Ainsi, malgré sa colère intérieure, Léopold demeure impuissant à améliorer sa situation. |
Idée secondaire 3.1 |
Léopold, à l'image du peuple québécois pendant la « grande noirceur », est aliéné et incapable de s'affirmer. |
Fait |
Il ne peut rien contre le pouvoir dégradant de sa « job steadée » qui le mine et qui finira par le priver tout à fait de ce qui lui reste humanité. |
Preuve |
« [...] dans vingt ans, j'srai même pu un homme. » |
Idée secondaire 3.2 |
Ce constat tragique de lucidité l'amène pourtant à pressentir le souffle de la libération que connaîtra le Québec de la Révolution tranquille. |
Fait |
Il se permet d'espérer de meilleures conditions de vie pour la génération qui lui succède. |
Preuve |
« Aujourd'hui, les enfants s'instruisent, pis y vont peut-être s'arranger pour pas connaître c'que j'ai connu... » |
Phrase conclusion/transition |
Si la révolte des enfants plus instruits se manifeste plus concrètement que celle de Léopold, sans doute n'auront-ils pas à vivre dans l'ignorance et à subir le même sort. |
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